Dans un monde secoué par les tragédies, émettre des vœux semble vain, même si chaque début d’année donne l’espoir d’un nouvel élan.
Comme psychanalystes nous savons que le combat de la culture contre la nature est toujours inachevé. Nous savons que la « nature » est toujours en lutte contre elle-même, travaillée par la haine, la déliaison, la pulsion de mort.
La fragilité des démocraties, la montée en puissance des régimes autoritaires et des dictatures nous alertent. Mais aussi les discours binaires, simplificateurs, complotistes. Et même certains discours prétendument scientifiques qui ne supportent pas la contradiction.
Dans ce contexte la psychanalyse est un rempart contre la dictature de la pensée où triomphe la raison du plus fort sur le plus faible.
Parce qu’elle reconnaît le conflit intrapsychique, parce qu’elle accepte de penser l’impensable, parce qu’elle sait que le moi n’est pas maître en son domaine, la psychanalyse a la capacité de résister aux tyrannies de l’esprit et de s’opposer à une pensée simpliste née de l’immédiateté et du sensationnalisme. Elle a la capacité d’essayer de penser, même l’horreur, et d’offrir une possibilité de tiercéiser qui fait tellement défaut aux convulsions du monde.
Si nous devons formuler des vœux c’est d’avoir confiance en nous. De souhaiter que la psychanalyse résiste, qu’elle retrouve plus de visibilité, qu’elle ne se replie pas sur elle-même. Qu’elle soit plus perméable à son environnement social et occupe à nouveau le champ de la santé mentale et des sciences humaines, trop longtemps abandonné.
Il nous faut résister aux attaques contre les liens et continuer de croire en ce que nous sommes. Loin du dogmatisme et des rigidités défensives, nous pouvons agir avec rigueur, dans un souci permanent de l'éthique, pour apaiser les souffrances et apporter notre pierre à l'édifice tellement fragile de la culture.
C’est alors plein d’espoir que l’on peut entamer cette nouvelle année, dans le plaisir du travail partagé, d’une réflexion et d’une élaboration communes, sources d’une créativité infinie.
Bonne année à toutes et à tous,
Jean Philippe Guéguen